Semaine S-6 : Le grand déménagement !

Réflexions humoristiques d'une sexa.

Billet

déménagement-2.jpgJe ne me rappelle pas de mon premier déménagement, j’étais bébé et il s’agissait de traverser la rue pour rentrer dans la maison familiale que mon père avait rachetée à sa fratrie.
J’adorais cette grande maison où les deux générations précédentes avaient laissé ce qui les encombrait dans un capharnaüm presque inextricable au grenier et dans une moindre mesure en cave où bizarrement de vieux livres moisissaient dont un traité de "Constructions civiles"* qui me rendit souvent service et a encore une place d’honneur sur mon bureau.
Ces étages extrêmes étaient un terrain d’aventures et découvertes sans cesse renouvelées, des chemises sans col à très longs pans (revenant la mode à ma plus grande joie d’ado) à double manchette nécessitant des boutons dorés, au smoking et haut de forme avec gilet brodé, des meubles en acajou injustement mis au rebut, des vieux jouets, le coffre de guerre de mon aïeul sur lequel le nom était peint en blanc à la main et un violon que j’écrabouillai d’un pied maladroit, une vraie liste d’objets laissés pour compte digne de la "Complainte du progrès " de Boris Vian **!

Lâchement, je fis comme les autres en quittant les lieux à 23 ans pour un petit appartement plus en adéquation avec mon goût de la liberté. J’abandonnai vieux vêtements et jouets pour ne prendre que l’essentiel au grand dam de ma mère qui donc ne sait rien jeter et déteste ranger.
Deuxième déménagement pour un trois puis quatre pièces au troisième à 500 mètres de la maison paternelle mais aussi du célèbre "carré" liégeois, lieu de libations que je ne manquai pas de pratiquer.
Six ans plus tard, mari, enfant, augmentation du patrimoine mobilier et décision d’en acquérir un immobilier ; troisième déménagement.
Une grosse camionnette et deux voitures suffirent ainsi que nos biceps et mollets encore galbés et vigoureux !

Franchement, notre vieux corps de logis renaissance mosane que beaucoup nous envient, je pensais y terminer ma vie.

Jusqu’à ce que j’aie l’idée d’aménager un logement adaptable *** dans le reste de la grange dont le toit commençait à fuiter de partout et qui était quand même un peu un chancre dans notre coquet site classé !
L’idée était d’y mettre des locataires pendant dix ans jusqu’à ce que ce soit notre tour d’avoir éventuellement besoin d’un ascenseur ou de déambuler en chaise roulante, puis finalement il parut évident de déménager tant qu’on en a encore l’énergie et entrer dans un confortable triplex aux dernières normes thermiques et esthétiques.

Je vous passe sur les trois mois de retard sur le planning, ça y est presque, et ce week-end nous avons pu commencer mon quatrième déménagement.

Le champ de manœuvres : deux maisons de trois niveaux séparées par 20 mètres de cour, dans la vieille, un escalier étroit, assez raide et aux marches usées et gondolées (quatre chutes et bleus atroces à ce jour) , de l’autre côté, un escalier large mais 2/4 tournants et une "trémie" d’ascenseur hélas encore vide (livraison très retardée).

Forces en présence : L’Homme néo-sexa et Bobonne ne pouvant plus porter et donc appelés à gérer le départ d’un côté et l’arrivée de l’autre, Copine néo-quadra dynamique, ses fils, Grantado tout en muscles et motivé et Jeunado à la carrure de baguette totalement effrayé à l’idée de devoir quitter ses jeux vidéos et manquant sérieusement de notions spatiales.

Objectif modeste: Transporter des lits, un gros bureau à volet et trois armoires de grande taille.

Déroulement des opérations : Mise en jambes avec deux sommiers à lattes bien légers, puis deux sommiers "tapisserie" munis de pieds, plus encombrants, aïe mon papier-peint.
Passage aux choses sérieuses avec le démontage d’une garde-robe ancienne à rendre tout designer technique d’Ikea jaloux (et clients maladroits envieux) : pas une vis, que de l’emboîtement de panneaux rabotés et tenons-mortairisés à la main ! Transport aisé, remontage évidemment un peu plus complexe mais tout va bien. Transport du bureau démontable lui aussi, fait.
Première embûche, un long meuble de mercerie à 20 tiroirs bien remplis destination 2ème, seul passage possible, l‘ascenseur qui n’existe pas, chemin le plus facile, faire le tour de la propriété via la servitude que nous conteste notre voisin honni (je reste soft) pour rentrer dans le nouveau garage où se trouve la trémie et clos depuis trois jours d’une belle porte sectionnelle attendue depuis des mois.
L’élévation se fait pendant que j’essaie tant bien que mal de préparer le repas, on m’appelle néanmoins pour une ultime aide en me prévenant que tout un angle s’est pulvérisé sous le poids, voilà de quoi calmer mon stress.
Respire !
J’essaie d’éviter que les clous mis à jour ne lacèrent mon magnifique parquet en chêne d’un prix qui fait sourire.
Ça y est le meuble est en place, pendant ce temps Jeunado, tout rouge, et l’œil d’un cocker à la mort, monte les tiroirs. Je ris, mais je ne voudrais pas être à sa place.
Reste la belle pièce, un beau vaisselier sobre en plaqué acajou (hauteur 255 cm), heureusement bi-corps mais dont le haut vitré fait l’objet de toutes mes inquiétudes vu le gâchis précédent, et le bas vu son poids et sa taille.
Une seule solution pour m’apaiser : il faut appeler super Léon, notre voisin fermier multi-qualités.
Entre rissolage d’oignons et ordres de menus transports, j’envoie l’Homme, timide pathologique, demander de l’aide à notre sauveur potentiel.
Eh, oui ! Vive la campagne ! A peine dix minutes plus tard tels Spartacus sur son char, déboulent fièrement au volant de leur Manitou****, Leonardus de son vrai prénom (si, ça ne s’invente pas) et son fils, deux bases souriantes et efficaces.
Et hop ! Avec un narquois "c’est du papier", le meuble est chargé et transporté sur la terrasse du premier devant une assistance pratiquement médusée sauf Copine, qui en bonne femelle, a anticipé en dégageant les meubles de jardin du parcours.
Je jette un œil à la sauce bolo pour éviter de cramer une casserole de plus, mon sport national actuel.
Et me dis.
Trop facile et si on montait déjà les machine à lessiver et séchoir ?
Que du papier !
Nos héros, le devoir accompli, nous quittent à grandes enjambées vers de nouvelles aventures plus agricoles.
Merciii !

Le repos des guerriers : Des pâtes et un repas convivial auquel s’adjoignent sur le tard Fifille et Beau-fils qui passeront l’après-midi à terminer l’assemblage de quelques meubles de cette enseigne suédoise qui ne connaît que vis et écrous en nombre bizarrement toujours surnuméraire.

Dégâts collatéraux : Outre le meuble pulvérisé réparé à grand coups de colle PU par Fifille, accrochage de la nouvelle porte sectionnelle par l’Homme, toujours trop fier pour demander de l’aide dans ses manipulations de remorque et jolie étoile dans le vitrage super isolant de la nouvelle porte-fenêtre, on ne sait pas de quand ça date, c’est sûrement l’œuvre des Panous.
Selon sa mère, dimanche, Jeunado a découvert des parties de son corps dont il ignorait l’existence potentiellement douloureuse si on les sollicite ! Ouïe !

Voilà, la première étape de mon, j’espère, ultime déménagement si on exclut la maison de repos que je veux éviter, objectif de tout ce remue-ménage, et évidemment celui qui, d’une façon ou d’une autre, nous guidera tous vers le retour à la terre.

A suivre : les cruelles séparations de souvenirs !

* De E. Barberot, architecte, Edition 1895 achetée par mon arrière-grand-père pour surveiller la construction de notre maison terminée en 1898. Pour la petite histoire ce livre renferme 1554 figures magnifiquement dessinées par mon confrère !
** Surnommé aussi "Les arts ménagers" 
*** Qu’est un logement adaptable ? 
**** Chariot élévateur télescopique agricole conduit de main de maître par notre voisin nous ayant déjà souvent bien aidé !

Je ne connais pas cette belle actrice rousse néo-sexa, voici pour la découvrir Patricia Tallman